Adaptation d’un article d’ACOGUATE* traduit par le Projet Accompagnement Québec-Guatemala (PAQG).
Le 1er octobre 2014 marquait le début du débat oral et public contre Pedro García Arredondo, ex-chef du 6ème Commando de la Police Nationale. Le 31 janvier 1980, 36 personnes y moururent calcinées. Durant le procès tenu au Tribunal B de Haut Risque, 14 personnes et 6 experts témoigneront, tandis que seront mis à contribution plus de 110 éléments de preuve.
Le seul survivant de l’incendie, l’Ambassadeur espagnol Máximo Cajal, avait témoigné en avril 2012, avant de décéder en 2014. Dans sa déclaration, il a raconté comment les forces de sécurité avaient entouré l’édifice, puis fait irruption par le toit et en brisant la porte, armées de fusils et de haches. Un paysan autochtone, Gregorio Xuya, avait également survécu et été transporté à l’hôpital, où il fut enlevé puis assassiné après avoir été torturé.
Peu de temps avant l’incendie, les paysans du Quiché s’étaient rendus à la capitale pour exiger du gouvernement la fin de la répression dans leurs communautés. Bien que reçus par le Président du Congrès, ils ne purent que constater l’intensification de la répression dans leurs villages. Face au silence de l’État, ils cherchèrent un soutien international et se tournèrent vers l’Ambassadeur espagnol. Cette initiative connut la fin tragique que l’on connaît : l’incendie de l’Ambassade où furent brûlées vives 36 personnes.
L’auteur et diplomate Fernando Schwartz écrivait : « La police prit d’assaut l’ambassade et y mit feu, avec l’intention délibérée qu’aucun témoin ne
survive à cet épisode. Dans les premières informations diffusées (…), avant qu’elles n’eurent le temps d’être censurées, on entendait clairement le
colonel (…) diriger l’assaut et crier « C’est l’ambassadeur ! Tuez-le ! ». »
Pour la Fondation Rigoberta Menchú Tum et les proches des victimes, qui luttent depuis 34 ans pour que justice soit faite, la vérité et la justice sont fondamentales pour le futur du Guatemala. Ils voient dans ce jugement l’opportunité « de rompre définitivement l’impunité ». Car, selon Carlos Chocooj,
directeur de la Fondation, « l’impunité est profondément incompatible avec la dignité ».
Pedro García Arredondo est donc accusé de plusieurs crimes ; assassinats, tentatives d’assassinats et crimes contre l’humanité. L’incendie de l’ambassade espagnole au Guatemala a été porté devant l’Audience nationale d’Espagne en 1999, selon le principe de juridiction universelle, et a été qualifié d’acte terroriste par l’Espagne. En mai 2014, le juge espagnol Santiago Pedraz a décidé de poursuivre l’enquête, car il s’agit « d’assassinats terroristes, perpétrés dans un contexte plus large de crimes contre la population guatémaltèque ».