Les fondateurs du Collectif - Arturo Taracena, fondateur du Collectif Guatemala

C’est en 1976 à Paris, que naît le collectif de solidarité avec le Guatemala, à l’initiative d’exilés guatémaltèques : Miguel Ángel Sandoval(1) et moi (Arturo Taracena-2). Nous serons rejoints plus tard par Arturo Arias(3) et Camilo Ospina(4). En septembre de la même année, notre « Pré-comité de Solidarité avec le Guatemala », soutenu par le Centre d’Études et d’Initiatives de solidarité internationale (CEDETIM), participe à la Fête Rouge de la Villette. Dans le même temps, des contacts sont noués avec les comités de solidarité avec le Salvador et le Nicaragua, respectivement proches des Forces populaires de libération Farabundo Martí (FPL) et du Front sandiniste de libération nationale (FSLN).

En 1978 nous investissons, avec d’autres collectifs de solidarité latino-américains, un local au 67, rue du Théâtre dans le XVème à Paris, et nous adoptons le nom de Collectif Guatemala. Fin 1979, Juan Mendoza, sympathisant de l’Armée de guérilla des pauvres (EGP), nous rejoint. En novembre, la première rencontre de solidarité européenne avec le Guatemala est organisée à Bruxelles, à l’initiative des comités belge et hollandais, avec des représentants d’Allemagne, d’Autriche, d’Espagne, de France, de Suède, de Suisse et d’Italie.

Dans le document final de la rencontre, nous nous sommes tous engagés à :

  • dénoncer les excès du gouvernement guatémaltèque,
  • manifester notre appui aux luttes populaires et à la lutte révolutionnaire en reconnaissant notamment le Front démocratique contre la répression (FDCR),
  • continuer les efforts pour coordonner efficacement la solidarité et l’étendre à tous les pays d’Europe de l’Ouest en travaillant en coordination avec les comités de solidarité d’autres pays d’Amérique centrale,
  • établir un échange permanent d’informations avec le mouvement populaire guatémaltèque.

C’est à la suite de cette rencontre, en décembre 1979, que voit le jour le bulletin de Solidarité avec le Guatemala, avec un logo dessiné par l’artiste guatémaltèque, résidant à Paris, Jacobo Rodríguez Padilla.

Parallèlement, nous avons établi des contacts avec le Parti socialiste français (PS), le Parti socialiste unifié (PSU), l’Action des chrétiens pour l’abolition de la torture (ACAT), la Cimade (Comité inter mouvements auprès des évacués), Terre des Hommes, Frères des Hommes, le Comité Catholique contre la Faim et pour le Développement (CCFD) et Amnesty International (qui lança le 15 septembre 1979 sa première campagne de défense des droits humains au Guatemala). Des contacts ont été établis avec des journalistes, comme Claude Roire du Canard Enchaîné ou Ramón Chao de Radio France International et des comités de soutien au Guatemala en province.

Le Collectif Guatemala avait besoin d’obtenir un statut juridique pour pouvoir imprimer des documents, lever des fonds, organiser des événements, etc. avec nos propres moyens. Ce processus a duré un an et finalement le 3 décembre 1980, la Préfecture de Police de Paris nous a donné le statut d’association à but non lucratif -loi 1901-. Le premier bureau exécutif était composé d’une présidente : Nicole Bourdillat, du PS, de deux vice-présidents : Jean Paul Lévy, avocat, et Dominique Camard, activiste des droits humains, et d’un secrétaire : Michaël Leibman, militant de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR).

Le 22 décembre 1980, grâce à nos contacts avec le CCFD, nous avons obtenu le financement pour l’élaboration d’un bulletin sur le Quiché : La terre tremble, qui, avec le bulletin de Solidarité Guatemala nous a permis de diffuser l’information lors de nos évènements publics mais également dans des librairies comme Artisans du Monde, La Brèche, etc.

Manifestation de soutien aux populations du Guatemala, Paris, 1981

Un moment clé de cette première étape a été le rassemblement « Six heures pour le Salvador et l’Amérique centrale », le 20 mars 1981 à la Mutualité, avec la projection de films et de diapositives, des chants, des poèmes, des témoignages et expositions. Les trois comités d’Amérique centrale s’étaient mis d’accord pour soutenir le Front Farabundo Martí de libération nationale (FMLN) salvadorien. L’évènement était présidé par Laurent Schwartz et l’ancien ambassadeur chilien Armando Uribe. Il y avait aussi Guillermo Manuel Ungo du Front démocratique révolutionnaire (FDR). Plus de 3 000 personnes étaient rassemblées pour le Salvador ce jour là. Ca a été pour nous comme un essai de ce que nous allions faire plus d’un an après, pour le Guatemala. Suite à de nombreuses réunions avec les collectifs de solidarité du Salvador et du Nicaragua, la Coordination centraméricaine de Solidarité vit le jour fin 1981.

Cependant, au cours de cette année 1981, tous nos efforts se sont concentrés pour retrouver la poète Alaide Foppa vivante. Le 31 mars 1981 le Comité International pour la vie d’Alaide Foppa et des disparus guatémaltèques a lancé un appel international par la voix de sa présidente : Dominique Éluard. L’appel fut signé par 125 personnalités. C’est dans ce contexte que de nouveaux membres ont rejoint le Collectif comme Philippe Morvannoux et Hugues Cayzac.

Le Collectif a pris contact avec l’association France Amérique Latine (FAL) et avec les syndicats CGT, CFDT et FO. La victoire électorale de François Mitterrand a permis au Collectif de débuter des relations avec le gouvernement français, notamment Régis Debray.

Le 6 janvier 1982, Rigoberta Menchú est arrivée en France. Elle venait du Mexique pour participer à une tournée européenne de dénonciation des crimes commis au Guatemala, organisé par le CUC. Elle est restée une semaine à Paris. Son témoignage a permis de mettre en lumière les activités politiques des Guatémaltèques en Europe, au moment où s’est créée la fonction de « Rapporteur spécial des Nations unies pour les exécutions extrajudiciaires », et s’organisaient des tournées du mouvement populaire guatémaltèque (Comité d’unité paysanne CUC, Comité national d’unité syndicale CNUS, Justicia y Paz). Le témoignage qui a paru l’année suivante chez Gallimard sous le titre de Moi, Rigoberta Menchú, avec pour seule auteure Elizabeth Burgos, est à l’origine d’une grande polémique.

Manifestation devant l’ambassade du Guatemala, 1984

Le 23 février 1982, après des années d’efforts acharnés, le Collectif Guatemala a pu organiser un grand événement de solidarité avec le Guatemala à la Mutualité. Il s’agissait d’une soirée artistique et politique, animée par le groupe « Les Guaraní », Pancho Cabral et Ángel Parra. Différentes personnalités politiques ont participé, dont la plus remarqué a été celle d’Arthur London, membre des Brigades internationales, résistant français, dirigeant du Printemps de Prague et ami du Guatemala. Tout cela a pu aboutir grâce à l’appui des membres de la solidarité comme Lisianne Marechal, Sophie Féral et Juan Escamilla, entre autre. La coïncidence a fait que deux délégués de l’Union révolutionnaire nationale guatémaltèque (URNG), qui étaient en tournée en Europe pour discuter de la signature de l’unité révolutionnaire, ont également pu participer.

Une nouvelle étape s’est ouverte dans l’histoire du Guatemala, surtout pour son appui décidé aux mouvements sociaux urbains et paysans guatémaltèques.

1. Sociologue, candidat aux présidentielles de 2007 du parti de gauche URNG-MAÍZ (Unité révolutionnaire nationale guatémaltèque).
2. Professeur d’Histoire à l’Université au Mexique.
3. Ecrivain guatémaltèque, professeur de littérature espagnole et américaine du XXème siècle, aux Etats-Unis.
4. Décédé en 2010 à Paris.

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