Depuis sa création, le Collectif Guatemala organise régulièrement des tournées de militants d’organisations sociales guatémaltèques afin de faire connaître et de sensibiliser le public européen aux problématiques du pays et d’obtenir des appuis à leurs revendications.
Il y a trois ans, nous recevions ainsi les représentants de la Finca Nueva Linda dont nous avons souvent l’occasion de donner des nouvelles dans la Lettre à l’Adhérent. L’an passé, Javier de León et Fernando Solis venaient nous parler de l’activité minière au Guatemala et plus spécifiquement, du cas de la mine Marlin à San Miguel Ixtahuacán.
Cette année, c’est avec honneur et plaisir que nous avons pu organiser la venue de deux femmes Maya Mam, Marìa Guadalupe Garcìa Hernández, de Mama Maquìn, et Carmen Mejìa, de l’Association pour le Développement Intégral de San Miguel Ixtahuacán-ADISMI. La thématique de cette année portait également sur l’activité minière et l’exploitation des ressources naturelles en général. Mais le thème transversal de la tournée, c’était avant tout la question du genre et la place de la femme- et de la femme autochtone- dans les luttes sociales au Guatemala. Et à ce propos, Marìa Guadalupe et Carmen Mejìa ont beaucoup de choses à dire. Marìa Guadalupe est originaire de San Ildefonso Ixtahuacán, dans le département de Huehuetenango. En 1982, elle fuit avec sa sœur vers le Mexique, comme nombre de guatémaltèques terrorisés par les massacres perpétrés par l’armée de Lucas Garcìa puis de Rìos Montt. Pendant cette fuite, sa sœur sera enlevée, violée, torturée puis assassinée par l’armée. Marìa Guadalupe parvient quant à elle jusqu’au Mexique et ce sera dans les camps de réfugiés du Chiapas qu’elle commencera sa formation politique, associative et féministe. C’est aussi dans les camps que l’association de femmes Mama Maquìn voit le jour et commence à revendiquer les droits des femmes et avant tout, le droit à l’accès à la terre, que seuls les hommes détiennent. En 1992, l’association -et Marìa Guadalupe- s’installe de nouveau au Guatemala et continue leur travail pour la reconnaissance des droits des femmes et en particulier, des droits des femmes autochtones, tout en soutenant la lutte pour la défense du territoire dans les villages ou viennent se réinstaller les réfugiés.
Carmen Mejìa, plus jeune, n’a pas connu les années les plus noires de la guerre. Cependant, son combat n’en est pas moindre et c’est par conviction qu’elle commence à se former politiquement, rêvant un jour de pouvoir aller étudier à l’université. Son histoire militante commence à peu près en même temps que l’exploitation de la mine Marlin, en 2005. Elle constate les impacts sur l’environnement, sur l’eau et sur la vie des femmes et décide alors de s’engager avec ADISMI pour que l’entreprise Montana, filiale de Goldcorp Inc., quitte le territoire de San Miguel Ixtahuacán, dans le département de San Marcos.
Ces femmes, pour moi exemplaires et sources d’inspiration, ont montré et montrent toujours un grand courage afin de mener de front leur vie de femme et leur vie de militante. Car on aurait tord de croire qu’une fois intégrées dans les mouvements sociaux « de gauche », tout est simple pour les femmes. Comme l’ont répété à différentes reprises nos invitées durant cette tournée, le combat social pour les femmes, c’est un double voire, triple travail. En effet, en plus de lutter pour sa « cause » comme la défense du territoire et des ressources naturelles par exemple, il faut également lutter contre les pré-jugés machistes chez soi mais également, au sein des organisations sociales. Et oui, il faut bien souvent du courage et de la ténacité afin de faire accepter et entendre la voix des femmes au sein d’espaces majoritairement contrôlés par des hommes.