Projet de barrage Xalalá, Ixcán

Emplacement approximatif du barrage hydroélectrique. Photo : Prensa Libre

Petite histoire du projet hydroélectrique Xalalá

Années 70. En plein conflit armé interne, le gouvernement guatémaltèque entend développer divers projets hydroélectriques sur la rivière Chixoy. L’un d’eux est le barrage Chixoy, dont la construction entre 1976 et 1983 est entachée de massacres et de déplacements massifs de population, le second est le projet Xalalá, toutefois abandonné en 1982. Le projet Xalalá concerne des zones des municipalités d’Ixcán, de Coban et d’Uspantan.

2001. Le projet hydroélectrique Xalalá est à nouveau mentionné dans le Plan d’Électrification Nationale de l’INDE (Instituto Nacional de Electrificacion). Les communautés autochtones de la zone ne l’apprennent qu’en 2005.

2007. Le 27 avril, lors d’un referendum populaire (Consulta comunitaria de buena fe) qui réunit plus de 25 000 votants, la population de la municipalité d’Ixcan rejette à 90% l’exploitation des ressources naturelles : pétrole, monocultures, projets hydroélectriques.

 Dans la foulée, l’association ACODET (Asociación de Comunidades por la Defensa del Territorio) est créée, regroupant 36 des 58 communautés potentiellement affectées par le projet de barrage.

 En septembre, l’INDE lance un appel d’offres pour la réalisation du projet Xalalá, mais aucune entreprise n’y répond.

2010. Une nouvelle consulta comunitaria est organisée, cette fois-ci dans la municipalité d’Uspantan : les projets d’exploitation des ressources naturelles (projets miniers et hydroélectriques) y sont également rejetés à hauteur de 90%.

2011 - 2013. L’INDE entame ce qu’il appelle le ‘travail social’, consistant à convaincre les populations du bien-fondé du projet de barrage Xalalá. Pour ce faire, il multiplie les promesses, dont la plupart ne relèvent pas de sa compétence (construction d’écoles, de routes, remise de panneaux solaires), et tente d’acheter le soutien de leaders communautaires.

2012. En décembre, l’INDE lance un nouvel appel d’offres pour la construction du barrage, qui reste à nouveau lettre morte. Une des raisons avancées par les entreprises est la conflictivité sociale qui règne autour du projet.

2013. L’INDE tente d’inviter les leaders communautaires à des réunions privées afin de les convaincre de soutenir le projet. En réponse, ACODET invite à plusieurs reprises les représentants de l’INDE à présenter le projet dans le cadre d’une réunion publique, ce que l’INDE se refuse à faire.

 Le 7 novembre 2013, l’INDE engage l’entreprise brésilienne Intertechne Consultores S.A. afin de réaliser les études de faisabilité du projet (géologiques et sismiques). L’INDE utilise le mécanisme ‘d’achat d’urgence’ et ne passe pas par un appel d’offres.

 Le 13 novembre 2013, l’INDE accepte de participer à une réunion publique à San Juan Chactela. Ses représentants y présentent les grandes lignes du projet, mais ne font aucune mention du contrat signé avec Intertechne Consultores S.A.

2014. Le 14 janvier, l’INDE lance un vaste programme d’électrification dans la zone ou est prévue la construction du barrage Xalalá et annonce publiquement la signature du contrat avec Intertechne Consultores S.A. ACODET considère que ce programme d’électrification est un cheval de Troie pour faire rentrer les ingénieurs dans la zone et réaliser les études de faisabilité pour le projet de barrage.

 Le 10 février, l’INDE soutient une plainte contre le porte-parole d’ACODET, l’accusant de diffamation. Ce-dernier avait révélé que trois leaders communautaires avaient reçu une forte somme d’argent de la part de l’INDE. Après qu’un témoin ait confirmé la version du porte-parole d’ACODET, l’INDE et les plaignants retirent leur plainte. Ce porte-parole sera victime d’une tentative d’enlèvement à la fin du mois d’août 2014.

 Le 25 février, vingt militaires et dix policiers cherchèrent à entrer dans la communauté de Xalalá, suite à une supposée plainte faisant état de la présence de narcotrafiquants dans la zone. Or, aucune trace écrite de la plainte n’a pu être fournie par les autorités, qui n’ont pas pu accéder à la zone suite à la mobilisation des habitants. En mai, l’armée tentera d’entrer dans la communauté de Copala la Esperanza.

 En avril, la Cour des Comptes (Controlaria General de Cuentas - CGC) signale de nombreuses irrégularités dans le contrat entre l’INDE et Intertechne Consultores S.A. et porte plainte contre 12 dirigeants de l’INDE : le directeur général, Marinus Boer, démissionne le 8 avril.

 Le 17 juin, et suite à l’action de la CGC, les autorités ancestrales des communautés de Xalalá et Las Margaritas Copon déposent un recours en justice contre le contrat, soutenus par le député Amilcar Pop, président de la commission de probité du Parlement. Le 22 juillet a lieu une audience publique durant laquelle les représentants des communautés présentes exposent leurs griefs. Les représentants de l’INDE et d’Intertechne Consultores S.A. ne se sont pas déplacés, se contentant d’un recours écrit. Le 1er août, la première salle du Tribunal des contentieux administratifs refuse d’annuler le contrat, mais reconnait l’absence de consultation préalable des communautés. Elle recommande en outre, que « les communautés impliquées apportent leurs propres spécialistes multidisciplinaires pour soutenir la réalisation des études ». Les communautés, refusant de participer à un contrat qu’elles considèrent illicite, font appel de cette décision le 8 août.

 Le 8 octobre a eu lieu une nouvelle audience publique à la Cour Constitutionnelle (Corte de Constitucionalidad). Dans un document écrit, l’INDE a indiqué avoir bel et bien consulté les communautés de la zone en prenant pour preuve les droits de passages signés par certaines des communautés. Les avocats d’ACODET et Amilcar Pop ont en revanche déclaré que ladite ‘consultation’ s’était limitée à une vision clientéliste (offre de projets, cooptation de leaders) et non à une véritable information transparente sur les implications du projet.

 À ce jour, les communautés sont encore en attente de la décision de la Corte de Constitucionalidad.

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